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Resume souffle de birago diop

Le 19/11/2017 à 17h33, demande d'aide
Je souhaiterai avoir le résumé du poème souffle de birago diop
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Le 06/12/2020 à 06h41
Cela avait commencé dès le lendemain de son arrivée, le jour même de mon départ de Dougouba.
Le sergent Thiémokho Kéita avait voulu empêcher son père de sacrifier un poulet blanc aux mânes des ancêtres pour les remercier de l'avoir ramené sain et sauf au pays. Il avait déclaré que, s'il était revenu, c'est que tout simplement il devait revenir et que les aïeux n'y avaient jamais été pour rien. Qu'on laisse tranquilles les morts, avait-il dit, ils ne peuvent plus rien pour les vivants. Le vieux chef de village avait passé outre et le poulet avait été sacrifié.
Au moment des labours, Thiémokho avait prétendu inutile et même idiot de tuer des poulets noirs et d'en verser le sang dans un coin des champs. Le travail, avait-il dit, suffit, et la pluie tombera si elle doit tomber. Le mil, le maïs, les arachides, les patates, les haricots pousseront tout seuls, et pousseront mieux si l'on se servait des charrues que le commandant de cercle lui avait envoyées. Il avait coupé et brûlé des branches du Dassiri, l'arbre sacré, protecteur du village et des cultures, au pied duquel on avait sacrifié des chiens.
Le jour de la circoncision des petits garçons et de l'excision des petites filles, le sergent Kéita avait sauté sur le Gangourang, le maître des enfants qui dansait et chantait. Il lui avait arraché le paquet de piquants de porc-épic qu'il portait sur la tête et le filet qui lui voilait le corps. Il avait déchiré le cône d'étoffe jaune sommé d'une touffe de gris-gris et de rubans que portait le Mama Djombo, le grand-pere-au-bouquet, maître des jeunes filles. Le sergent Kéita avait déclaré que c'était là des "manières de sauvages", et pourtant il avait vu le carnaval à Nice et les masques hilares ou terrifiants. Il est vrai que les Toubab, les Blancs, portaient des masques pour s'amuser et non pas pour enseigner aux enfants les rudiments de la sagesse des anciens.
Le sergent Kéita avait décroché le sachet pendu dans sa case et qui enfermait le Nyanaboli, le Génie de la famille du vieux Kéita, et il l'avait jeté dans la cour, où les chiens efflanqués faillirent l'arracher aux petits enfants avant l'arrivée du vieux chef.
Il était entré un matin dans le Bois sacré et il avait brisé les canaris qui contenaient de la bouillie de mil et du lait aigre. Il avait renversé les statuettes et les pieux fourchus sur lesquels le sang durci collait des plumes de poulets. "Manières de sauvages", avait-il décrété. Cependant, le sergent Kéita était entré dans des églises; il y avait vu des statuettes de saints et des Saintes-Vierges devant lesquelles brûlaient des cierges. Il est vrai que ces statuettes étaient couvertes de dorures et de couleurs vives, bleues, rouges, jaunes, qu'elles étaient, c'est certain, plus belles que les nains noircis aux bras longs, aux jambes courtes et torses, taillés dans le vène, le cailcédrat et l'ébène, qui peuplaient le Bois sacré.
Le commandant de cercle avait dit: "Tu les civiliseras un peu", et le sergent Thiémokho Kéita allait "civiliser" les siens. Il fallait rompre avec la tradition, tuer les croyances sur lesquelles avaient toujours reposé la vie du village, l'existence des familles, les actes des gens... il fallait extirper les superstitions. Manières de sauvages... Manières de sauvages, le dur traitement infligé aux jeunes circoncis pour ouvrir leur esprit et former leur caractère et leur apprendre que nulle part, en aucun moment de leur vie, ils ne peuvent, ils ne doivent être seuls. Manières de sauvages, le Kotéba qui forge les vrais hommes sur qui la douleur ne peut avoir de prise... Manières de sauvages, les sacrifices, le sang offert aux ancêtres et à la terre... Manières de sauvages, la bouillie de mil et le lait caillé versés aux Esprits errants et aux Génies protecteurs...
Le sergent Kéita disait cela à l'ombre de l'arbre-aux-palabres, aux jeunes et aux vieux du village.
Ce fut aux abords du crépuscule que le sergent Thiémokho Kéita eut sa tête changée. Appuyé contre l'arbre-aux-palabres, il parlait, parlait, parlait, contre le féticheur qui avait sacrifié le matin même des chiens, contre les vieux qui ne voulaient pas l'écouter, contre les jeunes qui écoutaient encore les vieux. Il parlait lorsque, soudain, il sentit comme une piqûre à son épaule gauche; il se retourna. Quand il regarda à nouveau ses auditeurs, ses yeux n'étaient plus les mêmes. Une bave mousseuse et blanche naissait aux coins de ses lèvres. Il parla, et ce n'étaient plus les mêmes paroles qui sortaient de sa bouche. Les souffles avaient pris son esprit et ils criaient maintenant leur crainte:
Nuit noire ! Nuit noire!
disait-il à la tombée de la nuit, et les enfants et les femmes tremblaient dans les cases.
Nuit noire! Nuit noire!
criait-il au lever du jour,
Nuit noire ! Nuit noire !
hurlait-il en plein midi. Nuit et jour les souffles et les Génies et les ancêtres le faisaient parler, crier et chanter...
...Ce ne fut qu'à l'aube que je pus m'assoupir dans la case où vivaient les morts et toute la nuit j'avais entendu le sergent Kéita aller et venir, hurlant, chantant et pleurant:
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